Moscou la Rouge aux mille coupoles dorées trébuche et titube aux rythmes de sa nouvelle révolution : dès que Lénine a été déboulonné, le règne du billet vert a commencé dans l’ex-empire communiste. Moscou n’attend pas. Et si des babouchkas tendent la main dans le métro, d’autres vendent du poisson séché et du pain frais sur la place Pouchkine face au McDonald’s gigantesque qui ne désemplit pas. Les étudiants peuvent en un repas y laisser leur bourse mensuelle. Aussi travaillent-ils souvent dans les petits kiosques qui occupent les trottoirs de Moscou : mini drugstores débordant de vodkas russes et importées, chocolat et parfums de Paris hors de prix. Près de la Place Rouge en chantier, la nébuleuse extrémiste de vieux bolcheviques, cosaques et Rambos slaves agitent les portraits de Staline et de Jirinovski. Plus loin et en musique, sous les éclairages Coca-Cola.
Les adeptes de krishna dansent pieds nus sur les trottoirs défoncés. Moscou se réveille : pour certains, le cauchemar est quotidien. Les « novoriches » en BMW vrombissent d’hôtels en restaurants, bardés de Cartier et de téléphones portables, rivalisent de vitesse avec les Mercedes gorgées de jeunes en survêtement Adidas et au crâne rasé. Moscou l’irrationnelle trépide et ne se calme qu’au détour d’une avenue délabrée aux peintures rocailleuses ocres et vertes. Tchekhov surgit et c’est Moscou la nostalgique au son d’une balalaïka du Slavianskii Bazar, où dînaient les plus grands de la littérature russe. Dans Moscou l’affairiste, les « biznessmeni » et autres cadres du parti reconvertis s’initient aux techniques du « ménédjment » et du « kompiouter ».
Sur la rue Tverskaïa, un jeune milicien en uniforme kaki tend sa main à une gitane. Que lui réserve l’avenir ?
Pour son premier dossier, Saison russe se penche sur la capitale russe pour vous la rendre plus proche de votre public : Moscou aujourd'hui, avec ses bouleversements démographiques et son cosmopolitisme, son architecture créative ainsi que les fantasmes qu'elle continue de véhiculer.